24/10/2010

Consommateur(trice) et Citoyen(enne)

Pour les consommateurs la période depuis la guerre jusqu'à aujourd'hui peut être divisée (pour faire simple) en deux: les 'trente glorieuses' jusqu'aux années 1980, et depuis 1980 jusqu'à aujourd'hui marqué par la mondialisation. La première période a vu une progression constante du pouvoir d'achat des Français, et en même temps l'apparition des grandes surfaces, qui donnaient expression petit à petit à l'abondance des produits qui étaient offerts aux consommateurs. Une nouvelle aire de prospérité s'ouvrait, et tout le monde était séduit! Une agriculture qui produisait de plus en plus grâce aux engrais et pesticides répondait à la demande à la fois des urbains consommateurs, et des grandes sociétés de distribution. Celles-ci développaient de puissantes centrales d'achat capables de faire venir de partout en France - et progressivement de l'Europe et du reste du monde - les produits alimentaires les plus variés.



Cette 'mondialisation heureuse' a pris un essor considérable à partir des années '80, et le consommateur pouvait manger des haricots verts du Kenya à noël, des tomates et des fraises tout l'hiver, et toutes sortes de fruits exotiques d'Asie et d'Afrique. A partir du dévéloppement de l'économie financière (la révolution Reagan/Thatcher) les grandes enseignes avec leurs puissantes centrales d'achat faisait de l'alimentation une source de profit, et étaient capables de dicter aux agriculteurs ce qu'ils devaient produire et le prix auquel ils devaient le vendre, et aux consommateurs ce qu'ils devaient manger. Mais les premières fissures se sont rapidement manifestées dans ce système parfait, où tous trouvaient leur 'bonheur'.



Déjà dans les années 60/70 nous avons entendu parler des surproductions en Europe. La Politique Agricole Commune (PAC) était contraint de dépenser des sommes considérables pour stocker ces surplus, et les retirer du marché, car des excédents entraînent inévitablement l'effondrement des prix. Le citoyen était de plus en plus conscients à travers les manifestations des agriculteurs que ces derniers subissaient des pressions à la baisse de la part de la grand distribution alors que lui-même, en tant que consommateur, était sous le feu constant des publicitaires: "Moi je suis le moins cher". Et puis il y a eu des événements plus dramatiques: le scandale de la vache folle, où par pur recherche de profits on a voulu transformer un ruminant en carnivore au mépris de la vie des animaux, et de la santé publique. Et puis les veaux élevés aux hormones, et les OGM etc. etc. La mondialisation heureuse avait volé en éclat pour beaucoup d'agriculteurs et citoyens/consommateurs.



Déjà dans les années '80 était né un mouvement l'Alliance, qui regroupait des agriculteurs, des mouvements écologistes, et des mouvements de consommateurs. De part et d'autre il y avait un mécontentement avec le système 'productiviste', et les pratiques de la grande distribution dans le contexte de la mondialisation. Depuis quelque temps des agriculteurs 'marginaux' et très minoritaires cherchaient à la fois de réduire leur dépendence de l'industrie chimique, et leur consommation d'énergie, d'une part, et d'autre part augmenter la valeur ajoutée de leurs productions. Est ainsi né le mouvement des AMAP (Association Pour le Maintient de l'Agriculture Paysanne). Avec leurs partenaires ils ont cherché à mettre en place des circuits de vente locaux qui garantissent à l'agriculteur une clientèle régulière et stable capable d'assumer sa part du risque inhérent à toute forme d'agriculture, en payant à l'avance sa consommation. De son côté l'agriculteur s'engage à fournir des produits sains, sans utilisation de produits chimiques polluants et dangeureux pour la santé. Il livre chaque semaine un panier de produits de saison.

Depuis une dixaine d'années fleurissent partout des expériences de circuits de commercialisation courts très divers: des magasins gérés par des groupes d'agriculteurs (La Halle Paysanne à Bourgoin); des groupements d'agriculteurs où chacun ouvre un point de vente chez lui, dans lequel le consommateur peut trouver une ou deux fois par semaine les productions des autres agriculteurs du groupe: fromages, légumes, fruits, viande de boeuf et de porc, volailles, oeufs etc (La Ferme de Malatrait à la limite des Communes de St. Georges et Roche); des AMAP (il y en a deux sur Villefontaine); des marchés de producteurs ou de producteurs bio, etc. Toutes ces expériences cherchent à réaliser un autre modèle d'agriculture, et une autre relation de cette agriculture avec le territoire où elle se trouve. Il s'agit pour l'agriculteur et le consommateur de devenir 'acteur' l'un et l'autre de la 'filière' qu'ils mettent en place. Le consommateur souhaite trouver des produits sains de l'agriculture locale; des légumes de saison, et peut-être par-dessus tout un autre lien avec celui ou celle qui produit sa nourriture.

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